Nicolas Pirat-Delbrayelle du think tank Tetû Connect, pionnier de l’inclusion en entreprise, a animé ce mercredi l’atelier « Les mots de l’inclusion : adoptez les bons réflexes » dans le cadre de notre programmation trimestrielle « Inclusion et diversité, la différence fait la force ».
Quelles sont les vertus de l’inclusion pour une entreprise ? Qu’est-ce que l’inclusion ? Comment rendre une organisation inclusive ?
Il a répondu à nos questions sur l’inclusion en entreprise.
Durant l’atelier, vous dites que ne pas être soi consomme jusqu’à 26% de notre énergie productive. Est-ce que vous pouvez nous en dire un peu plus ?
Le chiffre de 26% fait référence à une étude de l’OCDE de 2018 et 2019. Les chiffres que l’on pourrait amener en complément c’est qu’aujourd’hui seulement 4 personnes LGBTQI+ sur 6 se rendent visibles au travail. À peu près la même proportion estime que ça serait un risque majeur que d’être visible au travail pour leur parcours professionnel.
Quand on arrive dans l’univers du travail, on veut réussir et progresser donc on se cache, on se protège et on ment. Une étude réalisée en 2021 par le BCG intitulée « Out at work » s’est concentrée sur les premiers emplois estimait qu’une personne qui ne faisait pas son coming out dans la première année d’embauche dans une entreprise ne le ferait jamais. Ce chiffre de 26% est assez terrible, car si on considère que 10% de la population est concernée cela fait 2,6% de productivité en moins au global.
Comment une entreprise peut mettre en place les conditions de l’inclusion et finalement les conditions pour que chacun puisse être lui-même et puisse aussi être visible ?
La première mesure est toute simple et consiste à employer les bons mots. Une femme lesbienne c’est une lesbienne ça n’est pas une femme « comme vous ». Il n’y a pas de honte, il y a même un certain devoir, à utiliser ces mots pour que les personnes existent. On ne dit pas d’un manager « les gens comme vous », on va dire « un manager ». On utilise un mot pour désigner une personne, pour la qualifier au sens propre du terme et pour lui donner une place dans une organisation.
Il y a également des signaux d’apparence assez faibles mais qui sont forts en bienveillance et qui disent « Vous avez tous et toutes votre place, qui que vous soyez et quelle que soit votre façon de vous présenter. Vous avez votre place que vous soyez un homme ou une femme, que vous soyez racisé ou pas, que vous soyez une personne homosexuelle ou hétérosexuelle ou quelle que soit votre orientation affective où votre identité de genre ».
Ce sont des choses qui peuvent se dire de façon extrêmement simple en entreprise. Dans une entreprise que je connais, les équipes ont décidé de mettre une pancarte « Bureau ouvert à la diversité » plutôt que d’indiquer « Bureau libre » quand le bureau n’est pas occupé. Un autre exemple est de mettre en évidence sur son bureau une brochure présentant la marche des fiertés où en lien avec l’orientation affective où l’identité de genre. Ça permet de signifier qu’on est dans un environnement bienveillant.
A partir du moment où on ne représente les personnes que sous un seul angle, celles qui ne rentrent pas dans cet angle ne se reconnaissent pas et se disent « Est-ce que j’existe ? Est-ce que je peux dire que j’existe ? »
Je reprends volontairement l’exemple des femmes : beaucoup, si ce n’est la quasi-totalité des réseaux de femmes en entreprise n’ont qu’une représentation de la femme de type caucasien, plutôt blondes, trentenaires où cadres, en tailleur et style « working women » et je ne vois que très rarement des personnes racisées des personnes ne sortant pas de grandes écoles, habillées comme dans la rue. Je vois un stéréotype de femme voulant réussir dans les années 80 mais je ne vois pas une femme moderne de 2020.
Nous avons beaucoup parlé des mots lors de l’atelier. Comment définiriez-vous le mot inclusion ?
L’inclusion c’est permettre aux autres d’exister et ne jamais les considérer comme un risque pour soi-même.